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Extrémité inférieure de la cloche
du cabestan - |
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Extrémité supérieure de la cloche
du cabestan - |
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LA CONSERVATION ET LA RESTAURATION
D'UN CABESTAN PROVENANT DE L'EPAVE DE LA LOMELLINA
Le fond des mers est un milieu favorable à la préservation
des vestiges en bois. Cependant, même à l'abri de l'oxygène,
un phénomène de dégradation lent s'amorce par
dissolution des composés dans l'eau. Les bois perdent donc
peu à peu leur cohésion et risquent s'ils sont remis
subitement à l'air libre de voir leur structure interne s'effondrer,
ce qui provoque l'apparition de fentes et de déformations importantes.
Il devient donc nécessaire, dès lors que l'on exhume
un objet archéologique en bois, de contrôler son assèchement
tout en consolidant préalablement le squelette ligneux préservé.
La mission du Laboratoire de Conservation ARC-Nucléart est
d'assurer la conservation et la restauration de biens culturels divers
en matériaux organiques (bois, cuir, cordage, vannerie, andouiller,
os
). ARC-Nucléart dispose d'une équipe pluridisciplinaire
(techniciens, chercheurs et restaurateurs), de 3000 m2 d'ateliers
sécurisés, de réserves et de chambres froides,
d'une installation d'irradiation gamma pour la désinfection
des bois secs et pour la polymérisation des résines,
d'un lyophilisateur de 5 mètres et de cuves de traitement hauffées
qui permettent aussi bien l'imprégnation de vestiges de petite
taille que ceux de grande dimension.
Plusieurs objets provenant de l'épave de la Lomellina
ont été conservés et restaurés par ARC-Nucléart
depuis sa découverte (un calcet, des poulies, des moques et
des caps de mouton, une écuelle
) et notamment un cabestan
de facture très intéressante. Ce cabestan, préservé
sur 1,85 m de longueur environ, taillé dans une bille de chêne,
comporte dans la partie supérieure de la cloche deux amolettes,
et sur son pourtour, au moins quatre taquets insérés
dans des gorges aménagées en queue d'aronde pour les
recevoir.
La technique de la lyophilisation a été choisie pour
sécher et consolider le cabestan. Il s'agit d'un procédé
qui permet d'assécher les bois gorgés d'eau par congélation
puis sublimation : l'eau passe ainsi directement de la phase glace
à la phase vapeur et est éliminée à l'extérieur
de l'enceinte. Cependant, la méthode d'assèchement par
lyophilisation doit être précédée d'une
imprégnation par un produit cryoprotecteur et consolidant,
soluble dans l'eau, le polyéthylène glycol, afin de
protéger la structure interne du bois. Une immersion prolongée
de 18 mois, dans plusieurs bains chauffés et agités,
de PEGs de grades 200, 400 et 4000 a été nécessaire
pour obtenir une migration en profondeur du consolidant dans le cabestan.
A l'issue de ce traitement, le cabestan a subi un assèchement
par lyophilisation pendant quelques semaines.
Une fois l'objet sec, la restauration a consisté au remontage
des parties dissociées, au comblement des lacunes et à
la conception d'un support de conditionnement pour le stockage. Cependant,
avant d'envisager toute manipulation, les premières interventions
menées sur le cabestan visaient surtout à assurer la
consolidation de la surface qui était très fragilisée.
Ainsi, le re-fixage des écailles et des
soulèvements du bois a été réalisé
avec une résine acrylique en solution et lorsque cela était
nécessaire, certains soulèvements ont été
renforcés par une injection de pâte à bois retouchée
ensuite à la peinture acrylique. Enfin, à plusieurs
endroits, les oxydes métalliques présents dans les gorges
et qui auraient pu gêner l'insertion des taquets ont été
abrasés.
C'est seulement après avoir effectué des relevés
précis sur les taquets et les gorges que les quatre taquets,
désolidarisés au moment du traitement, ont été
ré-insérés dans leurs gorges respectives avec
un adhésif époxy. La pose de deux des quatre taquets
a cependant nécessité le renfort de tenons en acier
inoxydable car les surfaces de collage étaient réduites.
Malgré tout, la surface du cabestan restait très fragile
et manipuler le cabestan était une opération délicate,
c'est pourquoi un conditionnement adapté pour le stockage et
le transport a été mis en place. Un support en bois
avec trois parties transversales à encoches a été
fabriqué afin de maintenir le cabestan en position horizontale,
ceci pour faciliter son déplacement jusqu'au musée destinataire.
Cette pièce exceptionnelle a donc retrouvée toute son
intégrité. Ainsi préservée, elle pourra
prochainement être exposée à la vue de tous.
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