Artillerie
Le GRAN


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La présence d'une artillerie nombreuse à bord de la Lomellina au moment du naufrage est soulignée par un document de l'Office de la Mer, daté du 20 septembre 1516, qui a été retrouvé dans les archives de Gênes. En effet, il semble bien que se trouvaient à bord non seulement l'artillerie destinée à l'armement de la nef elle-même mais aussi une artillerie transportée ou stockée à bord, sans doute en relation avec les opérations militaires des guerres d'Italie. C'est d'ailleurs ce que la fouille a confirmé.
Toutefois, outre les canons les plus gros, un nombre important d'objets concernant les armes à feu en général ont été mis au jour : ceci illustre les termes utilisés dans les nombreux inventaires de l'époque dont nous disposons.

Artillerie principale



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- Canon, roues d'affût et plongeur -
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- Canon sur le faux pont -
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- Vue d'ensemble -
Photos : J.C. Hurteau / CNRS

Les objets composant l'artillerie principale sont des tubes et des culasses mobiles en fer forgé, des affûts avec les essieux et les roues correspondantes, des boulets et divers accessoires : refouloirs, cuillères, boutefeux, maillets, moules à boulets.

Une partie de l'artillerie n'a pas encore été remontée. Cependant, on estime que le nombre de pièces qui se trouvaient sur le site est compris entre 10 et 15 (nous ne savons pas si certaines concrétions métalliques sont des canons ou seulement des culasses). Deux d'entre elles ont été remontées.
Ces pièces en fer forgé sont composées de deux parties :

- la volée ou tube, dont l'âme est composée par une série de tiges forgées ensembles pour former un cylindre et renforcées par l'emmanchement à chaud de manchons annulaires de deux types : des manchons long et peu épais ainsi que des manchons courts et épais qui donnent au tube terminé une forme typique de cylindre nervuré au tube une fois terminé. Les anneaux les plus épais (les nervures) ont pour fonction non seulement de renforcer l'ensemble mais aussi de permettre d'encastrer le tube sur son affût dans des rainures qui y ont été pratiquées. Le tube est équipé d'anneaux de manutention.
- La culasse mobile est un cylindre fermé à une extrémité et muni d'un ou deux anneaux de manutention.

L'affût est façonné dans une seule pièce de bois. Le tube est assujetti sur la partie avant par des cordages qui le maintiennent, tandis qu'un logement pratiqué dans la partie médiane pour permettre l'insertion de la culasse et d'un coin de bois destiné à la caler contre la partie arrière. Cette dernière, plus haute, doit résister au recul de la pièce

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- Restitution du canon sur son affût -
Archaeonautica n°9, p.104, fig.57

Les boulets retrouvés sont de plusieurs types : ils sont fabriqués en pierre, en fer, en plomb ; il est à noter que certains boulets en plomb contiennent un dé de fer. Le grand nombre de calibres différents (plus de 20) indique un degré de standardisation très faible :

  - Les boulets en pierre sont les plus gros. Leur diamètre varie entre 273 mm et 80 mm.
- Les boulets en plomb sont les plus petits (ils comprennent les balles d'arquebuse). Leur diamètre varie entre 12 mm et 90 mm.
- Les boulets en fer ont un diamètre intermédiaire compris entre 70 mm et 175 mm.

C'est seulement dans une plage très étroite, comprise entre 80 et 90 mm de diamètre, que l'on trouve les trois types de boulets. Ce diamètre semble correspondre à un canon nommé canon serpentin, tirant indifféremment les trois types de boulets.
Seuls les boulets en fer semblent avoir été fabriqués à l'extérieur ; les boulets en plomb étaient fondus à bord (les moules ont été retrouvés). C'était aussi le cas pour les boulets en pierre puisque des boulets ébauchés ou à demi façonnés ont été retrouvés et qu'un inventaire de navire marseillais, daté de 1518, retrouvé dans les archives des Bouches du Rhône mentionne : " 15 picossas per faire peiras de bombardes ".

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- Types de roues retrouvées -
Dessins : M. G.
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Les roues d'affûts mises au jour sont aussi de types diversifiés :

- petites roues pleines de 30 cm de diamètre,
- roues pleines composites mesurant 1,20 m de diamètre,
- roues à quatre rayons (en fait, deux traverses perpendiculaires) de 1,25 m de diamètre,
- roues à 12 rayons de type traditionnel, sans bandage métallique, mesurant 1,20 m de diamètre,
- roues à 12 rayons de type traditionnel avec bandage métallique, mesurant 1,48 m de diamètre.

Les petites roues servaient à équiper les affûts de la nef tirant par les sabords.
Les roues sans bandage étaient destinées au tir des canons mis en batterie sur le pont supérieur et tirant par dessus le plat bord ou encore à terre sur les remparts.
Les roues avec bandage étaient réservées destinées au transport par la route (donc artillerie de campagne ou de siège) et n'étaient utilisées en aucune manière à bord des navires.


Artillerie secondaire



Deux tubes de cuivre rompus, dont l'un avait encore un boulet de plomb coincé dans la volée, ainsi qu'un tube d'arquebuse en bronze ont été également retrouvés, ce qui démontre que la petite artillerie du bord était souvent très variée. Les tubes en cuivre correspondent aux pièces montées sur affût pivotant dont on retrouve la trace soit dans les inventaires manuscrits, soit dans les collections des musées.

Accessoires



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- Boutefeux -
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- Moule à boulets -
Photo : Guy Martin

Divers accessoires ou fragments d'accessoires ont été mis au jour :

- fragment de boute-feux figurant une tête de crocodile. Plusieurs pièces du même type ont été retrouvés sur l'épave de la Mary Rose (1545),
- cuillère à canon en cuivre servant à décharger les canons,
- tête de refouloir,
- maillet en bois qui servait sans doute à introduire la cale bloquant la culasse mobile.
- Moule à boulets en pierre, destiné à fondre les boulets de plomb

Si l'on ajoute à ces objets mis au jour les données recueillies concernant la soute à poudre et les sabords d'artillerie, on voit que l'épave de Villefranche offre un panorama particulièrement large de l'artillerie embarquée au début du XVIe siècle.

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- Moule à boulets -   - Tête de refouloir -
Dessins : M. G.

© Max Guérout