Communiqué de Presse n°3/2006

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Soixante esclaves abandonnés pendant 15 ans sur un îlot désert de l’Océan Indien


Après un mois passé sur l'île de Tromelin les dix membres de la mission archéologique sous-marine et terrestre viennent de rentrer à La Réunion.

Partie de Bayonne le 17 novembre 1760, l’Utile, une flûte de la Compagnie Française des Indes Orientales, s’échoue le 31 juillet 1761 sur l’île de Sable (aujourd’hui île de Tromelin), un îlot désert de 1 km². Elle transporte des esclaves malgaches achetés en fraude, destinés à être vendus sur l’île de France (l’île Maurice actuelle).

L’équipage regagne Madagascar sur une embarcation de fortune, laissant alors soixante esclaves sur l’île avec trois mois de vivres et promettant de venir bientôt les rechercher.

Cette promesse ne fut jamais tenue et ce n’est que quinze ans plus tard, le 29 novembre 1776, que le chevalier de Tromelin, commandant la corvette La Dauphine, sauva les huit esclaves survivants : sept femmes et un bébé de huit mois.

Dirigée par le Groupe de Recherche en Archéologie Navale (GRAN) avec le concours d'un archéologue de l’Institut national de recherche archéologique préventive (INRAP), la mission archéologique sous-marine et terrestre, chargée d'étudier les conditions de vie et de survie des naufragés, rentre après un mois de séjour sur l'île de Tromelin (du 10 octobre au 9 novembre), avec un bilan remarquable.

            Malgré un alizé qui n'a pratiquement jamais faibli, l'exploration et le relevé complet du site sous-marin ont été réalisés dans des conditions souvent très difficiles. Ce travail a nécessité près de 120 plongées, représentant.150 heures de travail. Ce site, exposé aux fortes mers soulevées par les cyclones, contient les ancres, l'artillerie, le lest de fer, le lest de pierre du navire, en général localisés dans les sillons creusés par la mer perpendiculairement à la côte. De nombreuses pièces de gréement sont prises dans le corail. Plusieurs objets, dont deux fragments de la cloche du navire, ont cependant pu être mis au jour. Comme il fallait s'y attendre, des objets provenant de l'épave ont aussi été retrouvés à terre, sur la zone d'habitat des esclaves.

            Les fouilles à terre n'ont pas déçu l'attente des archéologues. En ce qui concerne la période de présence des français, il faut noter la découverte très rapide du four ayant servi à la fabrication du biscuit destiné à constituer l'alimentation pendant le voyage de l'embarcation de fortune jusqu'à Madagascar.
            La recherche des sépultures des marins et des esclaves, noyés au moment du naufrage, n'a par contre pas été couronnée de succès. Une prospection systématique par sondage dans l'arrière plage n'a pas apporté les résultats attendus, elle a cependant permis de mettre en évidence la zone de passage utilisée par les naufragés pour se rendre de la plage vers l'intérieur de l'île.
            La localisation de l'habitat des esclaves, situé sur le point haut du nord de l'île, a été le résultat le plus significatif de cette mission. Dans une zone très perturbée par les constructions modernes de la station météo, une partie du mur de l'habitation des esclaves a cependant pu être dégagée. Le sol d'origine, conservé alentour, a livré de nombreuses informations : concernant les périodes d'occupation; l'alimentation dont la base semble avoir été en première analyse constituée de tortues et d'oiseaux; la confirmation que le feu a été conservé jusqu'à la fin et alimenté, surtout au début, par du bois de charpente provenant de l'épave. La découverte la plus significative concerne une série de récipients en cuivre, six au total, de tailles différentes qui portent l'empreinte du travail des esclaves malgaches puisque certains d'entre eux ont été réparés de nombreuses fois par rivetage. Ils illustrent l'acharnement à utiliser jusqu'au bout les matières premières fournies par l'épave, mais symbolisent aussi l'usure du temps sur les choses et les hommes.
            Témoignages de la vie des esclaves, trouvés en place sur leur site d'habitation, ces objets sont d'une grande rareté.  En effet, très peu de vestiges matériels de la vie des esclaves ont été conservés, comme en témoigne l'extrême pauvreté des musées dans ce domaine.

            Cette campagne de fouille à laquelle participaient trois membres de la Confrérie des gens de la mer, une association réunionnaise, a été l'occasion de former deux des plongeurs de cette association aux techniques de l'archéologie sous-marine.

Cette opération était placée sous l’autorité du préfet des TAAF (Terres Australes et Antarctiques Française, chargé de l'administration des îles Éparses de l'océan Indien), en partenariat avec l’UNESCO et son programme « La route de l’esclave », avec le financement de la fondation d’entreprise Groupe Banque Populaire, des collectivités territoriales de La Réunion (Conseil Régional et Conseil Général) et de la Direction Régionale des Affaires Culturelles de La Réunion. Elle a en outre reçu l’aide du Ministère de la Défense (Commandant supérieur des forces armées dans la zone sud de l’Océan Indien) et de Météo France La Réunion qui auront apporté leur soutien logistique  pour le transport et le séjour de l’équipe de fouille sur l'Ile.
De nombreuses institutions et associations ont également apporté leur soutien et ont contribué à la réalisation de ce projet : l’Unité mixte de service (UMS) – Histoire et archéologie maritime (CNRS-Sorbonne-Musée de la Marine), la Société Française d’Histoire Maritime, l’association « Les anneaux de la Mémoire » (Nantes), l’Institut national de recherche archéologique préventive (INRAP), l’éducation nationale et notamment les académie de La Réunion,  l’association « La confrérie des gens de la mer » (La Réunion), l’Association Réunionnaise Culture et Communication (ARCC), l’Association généalogie et histoire des familles (Pays Basque - Adour Maritime), le Musée de la Compagnie des Indes de Lorient.

Communication
Comme à l’accoutumée le GRAN a diffusé sur son site Internet ( www.archeonavale.org/tromelin ) un journal quotidien, relayé par les sites de l’UNESCO, du Ministère de la Culture et des TAAF, permettant de suivre au jour le jour la progression de la recherche. En outre, grâce à un logiciel adapté et à un forum, les scolaires de La Réunion (Le Tampon et Saint-Leu en particulier) et de plusieurs autres académies, en particulier celles d’Orléans -Tours, de Nice et de Marseille, soit au total 14 classes, ont participé à l’opération et dialogué avec les chercheurs. Ils comptent poursuivre leurs échanges avec l'équipe jusqu'à la fin de l'année scolaire.

 

Contacts et renseignements :

Responsable du projet - GRAN Métropole
Max Guérout
Email : granmax@archeonavale.org
Téléphone : 00 (33) 4 67 35 92 01 ou 00 (33) 6 23 16 78 17

TAAF
Thierry Périllo
Courriel : thierry.perillo@taaf.fr
Téléphone : 00 (33) 2 62 96 78 09

UNESCO
Marie-Josée Thiel
Email : granmax@archeonavale.org
Téléphone : 00 (33) 1 45 68 44 20

Communication - GRAN Métropole
Sébastien BERTHAUT-CLARAC
Courriel : sebbc@neuf.fr
Téléphone : 00 (33) 4 66 04 05 41

A la Réunion
Jean-François Rebeyrotte
Courriel : jf.rebey@wanadoo.fr
Telephone : 06 92 65 53 97

Site internet - GRAN Métropole
Sébastien Eon
Maintenance et administration du site Internet du GRAN - www.archeonavale.org -, aspects techniques concernant la mise en ligne des journaux.
Email : sebastien.eon@archeonavale.org

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